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Textes recents

Jochen Thermann

Jamais je n’aurais dû l’embaucher.

Jamais je n’aurais dû l’embaucher. Il avait pourtant l’air d’avoir toutes les compétences requises pour remplacer mon cuisinier habituel. Schneider s’était mis en arrêt maladie pour ce qui menaçait de devenir un temps indéterminé, et c’est comme cela que je me suis retrouvé tout naturellement à embaucher ce petit homme trapu qui parlait un allemand approximatif. Les affaires devaient continuer à tourner, après tout, les clients avaient faim.

Souvent, les relations complexes que l’on entretient au quotidien et qui s’accompagnent d’un code indéchiffrable ne sont pas suffisamment claires. C’est seulement une fois que les choses nous ont échappé que l’on comprend comment fonctionnaient leurs mécanismes de régulation : comment Schneider organisait ses achats, comment il donnait ses indications à ses aides-cuisiniers, comment il composait ses plats et avec quelle fidélité il s’efforçait de faire avancer mon affaire.

L’aide-cuisinier travaillait en apparence exactement comme lui. Il faisait aussi ses achats lui-même. Il cuisinait de...

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The Cultural Logic of Environmentalization
The Cultural Logic of Environmentalization

Mathias Denecke (éd.), Holger Kuhn (éd.), ...

Liquidity, Flows, Circulation

Today, it has become a truism that capital circulates, that data, populations and materials flow, that money offers liquidity. These terms appear crucial for any description of our contemporary situation, whether in economics, media studies, or contemporary art. This book asks whether the preponderance of talk of flow, liquidity, and circulation is an expression of the cultural logic of today’s environmental capitalism.
  • capitalisme
  • culture digitale
Arts

Jacques Rancière

« L’appréciation esthétique d’une forme est sans concept. »

Qu’entendre par l’invocation d’une « esthétique de la connaissance » ? Manifestement il ne s’agit pas de dire que les formes de la connaissance devraient s’adjoindre une dimension esthétique. L’expression présuppose qu’une telle dimension n’a pas à être ajoutée, comme un ornement supplémentaire, qu’elle est là de toute façon comme une donnée immanente de la connaissance. Reste à voir ce que cela implique. La thèse que je voudrais présenter est simple : parler d’une dimension esthétique de la connaissance, c’est parler d’une dimension d’ignorance qui divise l’idée même et la pratique de la connaissance. 


Cette proposition implique évidemment une thèse préalable quant à ce qu’ « esthétique » veut dire. La thèse est la suivante : l’esthétique n’est pas la théorie du beau ou de l’art, elle n’est pas non plus la théorie de la sensibilité. Esthétique est un concept historiquement déterminé qui désigne un régime spécifique de visibilité et d’intelligibilité de l’art, qui s’inscrit dans une reconfiguration...

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  • Alain Badiou
  • esthétique
  • art contemporain
Il disait « ne travaille jamais ! »
Il disait « ne travaille jamais ! »

Raphaëlle Milone

Dachy Vivant

Vivant, je ne l’appelais jamais Dachy, je l’appelais Marc. On ne peut pas s’empêcher de les transformer, les morts. Ils nécessitent un traitement spécial. Je l’ai rencontré deux mois avant de faire une tentative de suicide, en mai 2014. J’avais vingt-deux ans. Un ami, C., nous a présentés ; ce devait être fait. J’étais en train d’élaborer le premier numéro d’un fanzine, que j’avais choisi d’appeler OROR. La première chose que j’ai expliquée à Dachy, c’est qu’OROR était la moitié lumineuse de Maldoror....
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Littérature

Joseph Mitchell

« Avis. Pas ­d’arrière-salle ici pour les dames. »

Il existe un restaurant dans River Street à Hoboken, dans le New Jersey, en face des jetées et à quelques pâtés de maisons de la remise du Lackawanna Ferry, qui s’appelle My Blue Heaven Italian Restaurant. Un été, je revenais de Copenhague sur un cargo de Hog Island, la nourriture était mauvaise et, quand le cargo s’est finalement amarré à Hoboken, le premier endroit que j’ai vu où je pouvais manger était My Blue Heaven et j’y suis allé directement avec ma valise à la main. Je me suis assis et le serveur m’a tendu un menu, mais avant que j’aie commencé à lire, il m’a dit que le plat du jour était un risotto avec du calamari et qu’il me le recommandait. « C’est du riz, a-t-il dit, avec des calmars. » Je n’avais encore jamais alors mangé de risotto, et certainement pas de calmar, mais j’ai commandé le plat du...

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Littérature

Joseph Mitchell

Madame, Monsieur, regardez la Danse !

Les calypsos viennent de Trinidad, une île britannique des Caraïbes proche de la côte du Venezuela qui fournit aussi au monde de l’asphalte ainsi que l’amer Angustura. Ils sont composés par des hommes hautains, amoraux qui boivent sec et qui se donnent le nom de calypsoniens. En grande majorité ce sont des Noirs. Une guitare sous le bras, ils passent leur temps dans les rhumeries et les cafés chinois de Marine Square et Frederick Street à Port-of-Spain, la ville principale de Trinidad, en quête de rumeurs autour desquelles ils pourraient construire un calypso. Nombre d’entre eux se vantent avec raison du fait que des femmes se battent pour avoir le droit de subvenir à leurs besoins. La plupart sont des vétérans des prisons de l’île. Pour se distinguer des hommes ordinaires, ils n’utilisent pas leurs noms légaux mais vivent et chantent avec des titres adoptés tels que Growler, Lord Executor,...

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Guy Debord fut le Christ de l’avant-garde.
Guy Debord fut le Christ de l’avant-garde.

Mehdi Belhaj Kacem

Tombeau pour Guy Debord

Guy Debord fut le Christ de l’avant-garde, immolé sur son idéologie, que plus que quiconque (Tzara, Duchamp, Artaud, l’actionnisme viennois…) il aura poussé à son extrême limite. Il en satura toutes les possibilités et toutes les impasses. Il n’y avait, pour ses prétentions démesurées, ni échec, ni réussite. Son parcours doit être aujourd’hui évalué selon d’autres mensurations : celles qu’à point nommé la disparition des avant-gardes nous laisse en héritage. Pour le dire avec Reiner Schürmann : la vérité est une « conflictualité...
Exotic?
Exotic?

Claire Brizon (éd.), Chonja Lee (éd.), ...

Une Suisse exotique ?

Pourquoi un objet, un vêtement, voire une personne, sont-ils perçus comme « exotiques » ? Plus largement, comment se construit le regard sur les choses ou les gens qui nous semblent appartenir à d’autres régions, d’autres continents ? Enfin, comment les objets « exotiques » conservés dans les musées sont-ils parvenus jusqu’à nous, et dans quelle mesure ont-ils conservé, voire accru, à travers le temps leur dimension exotique ? Ce livre, et l’exposition qui s’y rattache, proposent une perspective historique pour comprendre l’émergence de ce regard et...
  • exotisme
  • colonialisme
  • histore de l'art
  • Lumières
  • 18ème siècle

 

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